Virgen de Guadalupe. Manteau du monde

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Cristina Rubalcava nous invite au miracle. A partager le coeur de Marie, mère de Jésus, mère du monde, apparue au Tepeyac, quelques années après la conquête du Mexique par la très catholique Espagne. Là, un pauvre parmi les pauvres, le petit Indien Juan Diego, l’a vue rayonner jusque dans les nuées, un beau matin de l’an 1531. Les bras ouverts, nimbés de grâce, appelant à la paix et à l’amour. Depuis près de cinq siècles, sans discontinuer, la Basilique de Guadalupe est un lieu béni où la terre rejoint le ciel. La Vierge n’a plus besoin de s’y montrer pour y régner en souveraine. Des milliers de pèlerins viennent la vénérer, lui apportant leur souffrance comme la plus belle de toutes les offrandes. Les genoux en sang, les larmes aux yeux mais l’espoir au coeur, ils livrent aux incrédules le plus touchant témoignage de la foi populaire. Le vrai miracle n’est pas dans l’apparition ; il est dans l’espérance des foules.

C’est cette ferveur brûlante, fruit amer et sucré du divin Mexique, patrie du soleil et du feu, que Cristina Rubalcava a réussi à fixer sur sa toile géante. Dans une étonnante corrida céleste où le tragique côtoie le sublime, elle oppose l’histoire mouvementée de son pays natal et du monde à la sérénité offerte par le sein de Marie et parvient à entraîner, par la puissance du trait, un destin douloureux dans un courant ascendant. Maternité essentielle contre agitation existentielle, Marie, figure matricielle du Mexique, transforme la couronne d’épines en auréole de grâce. À travers une immense fresque, Cristina nous offre le Mexique comme une étreinte. Pas seulement maternelle, mais sensuelle, charnelle. Si l’art est tout ce qui élève l’homme, cette oeuvre gigantesque nous propulse, comme un souffle chaud, vers le mystère à visage humain, vers la voûte de la tendresse, sublime refuge de nos fragiles destinées. C’est une douce toiture, un dôme, une coupole de douceur que l’artiste veut au tendre au-dessus de nos têtes, comme pour nous protéger. Elle y parvient en mêlant les bouquets de rose de nos rêves, le carmin de notre chair et l’azur de nos plus beaux sentiments dans un bain de lumière bienfaisante. Loin de toute bondieuserie, c’est un touchant hommage à la piété sans fard, un hymne à la religion naturelle qui pousse spontanément chacun de nous vers la chaleur d’un monde habité par Dieu plutôt que vers une transcendance nichée dans la froideur des astres. Peinture incarnée, qui fait suite à tant de toiles dont le sujet principal est l’enlacement, l’embrassade, l’étreinte comme transport de l’âme. Cette fois, la Vierge de Guadalupe fusionne avec nous tous, frères et soeurs d’Adam et Eve.

Le Mexique, résumé de la terre. Marie, emblème de l’amour universel. Tout en peignant, Cristina Rubalcava se répétait à elle-même : « Mon oeuvre doit parler à tous ». Elle a relevé le défi. Et fait don, à tous nos regards, d’une Sainte Vierge grande soeur de l’humanité.

Christian MAKARIAN
Auteur de « MARIE », Éditions Jean Claude Lattès



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